Chez
les compagnons faire son Tour c'est voyager en France et à l'étranger et surtout vivre en communauté dans les maisons compagnonniques aussi appelés "cayennes". Longtemps les compagnons les ont construites de leurs mains et manifestent de leurs savoirs-faire. Mais en y regardant de plus près, elles sont bien plus que ça.
La
maison est un lieu de recueil, un fort intérieur, un enclos, une
bulle. Quand on rentre chez soi on s'exclut du monde, on en
sort. Occuper un espace et se l'approprier c'est avoir des repères,
les créer et laisser la place à la construction de son identité.
La maison est un repère pour le voyageur car il partout où il part,
un morceau de son cœur reste toujours dans un coin de sa demeure.
Nous sommes tous plus ou moins nomades. Nous nous déplaçons de plus
en plus pour aller travailler, faire nos courses, partir en
vacances... mais partir n'est pas s'en aller, partir c'est revenir et
revenir c'est rentrer chez soi. Non seulement nous pouvons
nous retrouver, c'est à dire chacun les uns avec les autres
membres d'un foyer, d'une communauté, mais se retrouver renvoie aussi à soi-même. Avoir un chez soi
est important pour renouer avec soi-même, son identité. Ce rapport
à soi et aux autres prend alors plusieurs dimensions, s'étend sur
différentes échelles. Chez soi peut se réduire à un
bâtiment lorsqu'on désigne la maison, l'appartement. Chez soi
rappelle aussi l'endroit plus étendu village ou ville d'où l'on
vient, d'où on se sent le plus appartenir, ou même une région, ou
carrément un pays. Bien plus qu'une question d'ordre géographique,
le chez soi témoigne de l'affection particulière
d'appartenance à un groupe social, une communauté. Chez soi
est alors avant tout là où se trouve notre famille, nos amis, nos
concitoyens et dans des cas historiques comme celui de la question
palestinienne nous comprenons qu'être chez soi au delà des
considérations théoexégésiques signifie surtout être avec.
Un
lieu est un repère, il répond à des codes et se veut rassurant.
Ces codes différencient les écoles des bibliothèques, des
hôpitaux. L'organisation d'un lieu est importante et lui donne son
identité. Nous constatons aujourd'hui comment les magasins sont
organisés de manière à rassurer le client, lui éviter de se
perdre et le mettre à l'aise mais de la même manière (moins
commerciale) nos foyers parce qu'ils se ressemblent rassurent les
invités.
Nous
faisons nos maisons à notre image, en voulant mettre en avant ce que
nous voulons que les autres voient de nous. De la même manière que
nos habits nous définissent, les maisons au même titre ne sont que
des enveloppes matérielles qui supportent l'expression de nos
personnes.
Avec
le temps, un lieu se charge de mémoire collective, de souvenirs et
c'est aussi ça qui fait sa force. Un lieu vit à travers ceux qui
l'habitent. Quoi de plus vivant qu'une maison partagée par des
dizaines de personnes rassemblées sous un toit, mangeant, dormant et
travaillant les uns avec les autres du mieux possible ? Une
maison de compagnons est un lieu vivant, un endroit de rencontres, un
carrefour. Une rencontre de cultures différentes, de générations
différentes, de passés et d'horizons divers, de métiers variés
mais aussi de caractères et d'opinions propres à chacun. Cette
multiplicité n'est pourtant pas un frein, c'est justement ce qui
fonde toute la vivacité de ces maisons en mouvement quasiment toutes
les saisons.
La
maison est aussi un symbole fort. C'est ce que nous partageons avec
les autres. Ceux avec qui nous cohabitons dans le présent mais c'est
également le patrimoine de la communauté à laquelle nous
appartenons, c'est-à-dire nos prédécesseurs comme nos successeurs.
La ville, la nation et la planète le sont également à d'autres
échelles. La maison alors est le bien matériel qui manifeste de
notre cohésion. En prendre soin c'est prendre soin de ce lien qui
nous unit (de la même manière, prendre soin de la Terre est prendre
soin de ce lien qui unit tous les terriens, humains ou non). Quelle
différence pouvons-nous faire entre une maison et un temple ?
Le temple est un lieu de culte mais hormis cette fonction propre un
dojo, une maison ou une église doivent être pris dans une même
considération : en tant que support d'une identité.
Cette
identité peut se manifester par des signes distinctifs, une équerre
et un compas ou une croix mais s'arrêter à l'image d'une chose, son
apparence n'est ni bien ni mal, l'important est de pousser les portes
et d'être curieux de savoir ce qui se cache derrière une carapace
ou un écrin de verre : des hommes comme nous tous.
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