mercredi 3 octobre 2012

Sémiologie du corps : le poil (et le cheveu)

Doit-on encore et toujours se conformer dans la coupe de nos cheveux ?
Cette question paraît superficielle mais est bel et bien existentielle !
Il est étonnant de voir que la sphère capitaliste de la personnalisation à outrance ne se soit pas encore répandue à la coupe de cheveux, partie du corps comme objet d'expression pourtant privilégié. La réponse est évidente mais toujours paradoxale : on soigne les apparences d'individualités qui sont finalement toutes les mêmes.

Le poil a quelque chose d'animal. C'est instinctivement ce qui nous fait préférer les mammifères aux reptiles. Allez savoir maintenant quel lien établir entre la peluche et l'impression de douceur ? Les représentations que nous faisons des animaux jouent sur nos affects. De nos semblables les singes nous avons perdu ce qui recouvrait notre visage abondamment. Que reste-t-il ? Si l'on considère la fonction biologique du poil comme régulateur thermique alors il n'est plus que superficiel, superflu car remplacé par nos vêtements. Il a cependant encore et toujours une fonction. Quelle est-elle alors ?
Aujourd'hui la persistance animale se lit sur nos têtes. Ce qui distingue l'homme de la femme dans une dialectique de genre distingue également l'homme de l'animal dans une dynamique de l'espèce. Le concept de virilité se rapproche alors de celui de bestialité. Mais il n'est pas lieu ici de se demander si l'homme est plus animal que la femme (il y a pourtant tant à dire...). La question ici est de se demander comment chacun peut jouer avec ou contre ce qui n'est pas un organe au sens propre du terme mais qui constitue une partie de soi importante.

La coiffure est importante car elle fait partie de ce que nous avons de plus singulier : les traits de notre visage. Les cheveux peuvent cacher et peuvent être cachés, mis en avant ou dissimulés. Il n'existe pas de coiffure neutre, car même l'absence de celle-ci marque un choix esthétique. La coiffure reflète les modes à travers le temps et à travers les idées.
Si le temps passe et les jours se ressemblent, ils diffèrent pourtant. Deux personnes peuvent partager la même coiffure mais jamais n'auront les mêmes cheveux. Mais de la même manière une même personne subit les ravages du temps. Ses cheveux tombent jour après jour et repoussent également, ainsi sa peut rester la même sans que les cheveux qui la composent ne soient identiques. Doit-on y voir une image de la société ? On le peut !

Si c'est ce qui nous rapproche de l'animal, c'est également ce qui nous rapproche du végétal. Les cheveux semblent avoir leur croissance propre, indépendante. C'est symboliquement la vie qu'ils représentent et certains peuvent aller jusqu'à les considérer comme sacrés. On peut également les tailler comme on le ferait pour un bonsaï. La pilosité s'impose à nous et révèle les exigences de chacun. Certains s'en occupent quotidiennement et d'autres la négligent.

La coupe de cheveux est encore aujourd'hui sexuée parfois interprétée de manière sexiste, les filles ont les cheveux longs et les garçons des cheveux courts. Doit-on y voir une quelconque signification ou un simple conformisme ? Les idées évoluent et les mœurs avec, on sait combien l'extravagance peut être une soupape d'expulsion face à un cadre social trop rigide. Certaines coupes sont des symboles idéologiques, une crête ou des dreadlocks renvoient immédiatement à des cultures particulièrement marquées d'un point de vue esthétique. Parfois le refus des normes esthétiques classiques donne lieu à d'autres normes, comment considérer alors le mouvement punk qui se positionne contre les normes alors qu'il en établit de nouvelles ?


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