jeudi 7 juillet 2011

Objets 1

Si les mois qui arrivent sont pour la plupart d'entre nous synonymes d'ensoleillement, de vacances et de repos nous nous préparons également pour l'année d'études ou de travail qui va suivre et les déménagements se multiplient. On voit sur les trottoirs des ensembles entiers de mobiliers entassés au mieux dans des autos trop petites qu'on reconnaît d'un simple coup d’œil, la lumière ne passant même plus à travers les vitres, sur les routes allant d'une ville à une autre.
Avant de partir, on aura pris soin de ranger, classer, trier les objets qu'on avait accumulés jusqu'à ce moment où il faut faire de l'ordre, de la place. On sort les cartons et pendant des heures chaque chose que l'on possède nous passe entre les mains, subissant pour certains le jugement final : " Cela vaut-il vraiment la peine que je garde ça ?". Se met en place alors inconsciemment tout un processus mental de réflexion sur nos objets. Suivant sa fonction, son ancienneté, son estimation de durée de vie, sa fréquence d'utilisation, son état, les souvenirs qui y sont attachés, ses liens avec un ou plusieurs autres objets, chacun est manipulé, observé et analysé pour l'épreuve du déménagement.
Les recalés finissent à la poubelle, à la déchetterie, et il n'est pas rare d'en voir abandonnés aux pieds des immeubles, attendant leur funeste destin. Par chance certains sont recueillis et trouvent dans d'autres foyers de nouvelles vies. Quel contraste ironique de savoir ces pièces vides et ces camions pleins. Sans rentrer dans des considérations économiques ou traitant de la valeur du travail, a-t-on vraiment besoin de gagner plus, d'avoir un super pouvoir d'achat, pour dépenser plus ? La question paraît très naïve, elle l'est. Mais les réponses méritent que l'on s'y intéresse.
Qu'il s'agisse de vêtements, de gadgets, de mobilier, les objets définissent un tas de choses. Ils sont représentatifs d'une époque, d'un style, d'un goût, suivant leur gamme d'usage et leur prix on peut même affirmer qu'ils représentent des classes sociales. Bon gré, mal gré, ils nous définissent. Avec obsolescence programmée on discute des goûts et des couleurs tous les deux mois, avec la vitesse de progression des technologies, notre société de consommation a réussit à créer un genre de frénésie qui nous poussent à toujours posséder le dernier gadget de peur d'être en retard sur son temps. Même les objets les plus simples, à la base purement fonctionnels, sont de plus en plus sujet à réflexion esthétique. Une simple poignée de porte chromée au design futuriste peut coûter aussi cher qu'un loyer d'appartement. Sans revenir aux chevaux et aux bougies, réfléchir sur la véritable origine d'un besoin/désir n'est jamais inutile. Je n'aurai pas de montre de luxe une fois arrivé à un certain âge, aurai-je pour autant raté ma vie ?
Qu'elle soit politique, sociologie, psychologie, philosophie, n'importe quelle science humaine traite de manière directe ou indirecte du rapport à l'autre. Au delà de leurs fonctions premières, de leurs réelles nécessités, les objets que nous possédons contribuent à établir les rapports à soi et aux autres. (L'économie est également basée dessus). Avec ceux-ci nous voulons montrer qui nous sommes. Nous avons besoin d'avoir ces repères qui témoignent de notre évolution, du temps qui passe, du labeur dont on retire le mérite. Nous avons besoin de nous créer, chez nous, notre univers. Les souvenirs, les cartes postales nous rappellent le passé. Ce qui a été accompli. Nous accumulons et entassons tout ce qui peut nous laisser croire que nous remplissons notre vie. Pour beaucoup, les objets constituent même des buts. Avoir une belle voiture, une maison. Tristes ambitions pathétiques quand elles ne restent qu'un horizon, parfois atteint sans même avoir profité du paysage. Être antimatérialiste ne signifie pas rejeter la possession. S'affranchir du besoin de posséder c'est accorder de l'importance d'une part à ce que l'on possède déjà sans y être aveuglement attaché, d'autre part et principalement, c'est profiter de tout ce qui n'est pas de manière évidente concret, physique, palpable. Même si ce que nous avons nous définit, ce n'est pas nécessaire, et encore moins suffisant. N'oublions pas que les choses sont éphémères, les situations aussi. Nous pouvons tout perdre du jour au lendemain. Que resterait-il alors ? Notre simple personne, authentique et véritable.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire